Les périodes sensibles d'après Maria Montessori
Les "Périodes sensibles" sont l'une des découvertes majeures de Maria Montessori
C'est en observant des enfants du monde entier pendant plus de 50 ans que Maria Montessori a découvert ces périodes. La compréhension de ces "périodes sensibles" lui a permis d'expliquer de manière scientifique le développement de l'enfant.
Selon Maria Montessori, chaque enfant est unique. Il a sa personnalité propre, son rythme de développement, ses qualités et ses difficultés éventuelles. Mais les enfants traversent tous les mêmes "périodes sensibles". Quelles sont les caractéristiques et fonctions des périodes sensibles ?
- La nature a doté l'être humain de forces intérieures qui le poussent irrésistiblement vers certaines choses plutôt que vers d'autres.
- Ces périodes sont établies par la nature. Ni l'enfant ni nous-mêmes n'en décidons ni le début ni la fin.
- Chaque période sensible permet à l'enfant de créer et de construire ce qui caractérise l'être humain : le langage, les mouvements, l'intelligence...
- Ce sont des périodes transitoires qui se succèdent graduellement.
- Ces périodes sensibles ne sont pas isolées les unes des autres ; plusieurs périodes se chevauchent car elles sont liées entre elles et se soutiennent mutuellement.
Pendant ces périodes :
- l'enfant est particulièrement sensible à certains aspects de son environnement comme : l'ordre, les petits objets ou le langage ;
- il sera disposé à acquérir des fonctions bien spécifiques ;
- il est alors totalement "absorbé" par son activité et s'applique à acquérir une compétence particulière ;
- il assimile telle ou telle acquisition.
Dès que le caractère est développé, la "sensibilité" cesse.
Ainsi, chaque enfant évolue et se développe par paliers
Chaque enfant traverse ces périodes à des âges différents ; plusieurs périodes peuvent se superposer. Les différentes périodes sensibles sont :
- la période sensible de la coordination des mouvements (entre 18 mois et 4 ans) ;
- la période sensible du raffinement des sens (entre 18 mois et 5 ans) ;
- la période sensible du langage (entre 2 mois et 6 ans) ;
- la période sensible de l'ordre (entre la naissance et 6 ans) ;
- la période sensible du comportement social (entre 2 ans et demi et 6 ans) ;
- la période sensible des petits objets (au cours de la deuxième année sur un temps très court).
C'est par les sens que l'enfant perçoit et comprend le monde qui l'entoure : les sens sont les organes de préhension des images du monde extérieur.
Ce que l'enfant apprend c'est ce qu'il observe, ce qu'il manipule, ce qu'il expérimente. À partir de ce constat, Maria Montessori a mis au point du matériel éducatif progressif et concret que l'enfant utilise seul à son rythme en fonction du besoin du moment.
À quoi cela sert-il de connaître les périodes sensibles ?
Comme nous l'avons vu, les périodes sensibles s'entremêlent et apparaissent de manière spécifique à chaque enfant. Pour cela, il est important de les connaître et de les reconnaitre, afin de les alimenter au moment opportun pour chaque enfant.
Il est absolument indispensable que l'environnement (ou "l'ambiance" comme l'appelle Maria Montessori) offre au moment propice à chaque l'enfant les moyens de se développer à son propre rythme en respectant ces périodes sensibles. Si l'enfant est aidé et bien accompagné à ce moment bien précis, l'apprentissage se fera en profondeur.
Ce qui est fondamental également, c'est de ne pas contrarier les apprentissages qui correspondent aux sensibilités de l'enfant, au risque de rendre ultérieurement ces apprentissages beaucoup plus fastidieux.
Cela signifie : doser notre aide pour laisser l'enfant faire tout seul, même si cela n'est pas toujours évident. Par exemple, pendant sa période sensible au mouvement, l'enfant aura envie de se boutonner tout seul ou de mettre ses chaussures tout seul ou encore de se servir à boire dans un verre tout seul. C'est l'aider réellement que de le laisser faire "tout seul".
Si l'enfant n'a pu obéir aux directives de sa période sensible, l'occasion d'une conquête naturelle est perdue, perdue à jamais.
Maria Montessori
En effet, si l'enfant ne trouve pas les éléments (dans le matériel par exemple) qui répondent aux besoins de sa période sensible du moment, la sensibilité s'affaiblira petit à petit. L'apprentissage sera toujours possible, mais sera sans doute plus laborieux.
Un bon exemple est l'apprentissage d'une langue. En effet, un enfant peut apprendre une nouvelle langue beaucoup plus vite qu'un adulte, tant que la période sensible chez lui n'est pas passée. Seul l'enthousiasme pourra alors recréer des conditions agréables d'apprentissage, comme le démontrent les neurosciences : L'enthousiasme, de l'engrais pour le cerveau.
Il peut être également important et utile de comprendre le fonctionnement des périodes sensibles pour décoder les réactions des enfants. Quand des obstacles extérieurs entravent l'activité vitale des enfants, l'existence d'une période sensible peut se manifester par des réactions violentes, par des désespoirs que les adultes jugent sans cause et qu'ils appellent "caprices". Les obstacles à l'expression des périodes sensibles se manifestent par des moments d'activité inutile et désordonnée que Maria Montessori compare à des "fièvres". Ces fièvres de la vie psychique sont des agitations violentes pour des causes qui paraissent insignifiantes aux adultes mais qui sont en fait en rapport avec la sensibilité exceptionnelle de l'enfant lors de sa période sensible.
Les caprices sont l'expression d'une perturbation intérieure, d'un besoin insatisfait, ce qui crée un état de tension. Ils représentent une tentative de revendication de l'âme qui cherche à se défendre.
Maria Montessori, L'Enfant (1935)
La progression naturelle des apprentissages
Selon Maria Montessori, si le fait de profiter des périodes sensibles est fondamental, cela ne suffit pas. Il faut aussi ne pas chercher à brûler les étapes.
Le temps que les tout-petits passent sur des activités comme plier, verser, empiler, juxtaposer ou encore porter est extrêmement important. Ces activités paraissent "naturelles" et peuvent sembler inutiles et sont, de ce fait, parfois négligées. En réalité, ce temps est mis à profit par l'enfant pour apprendre à coordonner ses mouvements, associer son regard et son geste, se concentrer, s'organiser dans son travail. L'enfant "construit" ainsi une base pour les futurs apprentissages. Ensuite, les apprentissages scolaires – calcul, langage et autres – se feront de façon plus naturelle en se posant sur des fondations plus solides.