Nouvelle vie d'une famille française expatriée à Los Angeles
Dans notre nouvelle vie et notre quête de comment éduquer autrement nous croisons régulièrement la route de gens passionnants et passionnés. Ces rencontres enrichissantes nous apprennent beaucoup dans des domaines très différents. Nous avons depuis longtemps l'envie de les partager.
Nous vous présentons aujourd'hui Stéphanie Brillant. Journaliste, présentatrice de télévision, réalisatrice, productrice, auteure et conférencière, Stéphanie est également maman de deux enfants. Installée aux États-Unis avec sa famille, elle consacre son travail à la libération du potentiel humain et aux thématiques liées à l'éducation éclairée.
Elle est la réalisatrice du documentaire "Le cerveau des Enfants - un potentiel infini" et l'auteure de "Guide du Cerveau pour parents éclairés" aux Éditions Actes Sud. Stéphanie réalise actuellement un nouveau film "Take a Breath", un documentaire sur l'incroyable pouvoir du souffle.
Comme nous, Stéphanie est passionnée par les découvertes des neurosciences. Nous partageons la même envie de comprendre comment fonctionne notre cerveau et comment, armés de ces nouvelles connaissances, nous pouvons aider nos enfants à s'épanouir dans leur vie.
En tant que parents nous sélectionnons les graines que nous souhaitons voir pousser dans le verger de nos enfants.
Stéphanie, pourriez-vous nous présenter votre famille ?
Je suis à ce jour Maman de deux enfants. Mon fils ainé est âgé de 9 ans et ma fille de 4 ans.
Pourquoi avez-vous déménagé aux États-Unis et depuis quand ?
J'ai emménagé aux États-Unis il y a près de 5 ans. Pourquoi, me demandez-vous ? Eh bien, à l'époque c'était plutôt pourquoi pas ? Le père de mes enfants avait l'envie de venir s'installer à Los Angeles pour initier un projet de long métrage qu'il avait. J'avais la sensation que j'étais arrivée à la fin d'un cycle en France. C'était le bon moment.
Les enfants étaient-ils scolarisés en France ? Comment ça se passait ?
Mon fils a fréquenté l'école française. Sa première école était très chaleureuse, ses encadrants bienveillants. Cet environnement lui a apporté une base sécurisante de socialisation.
Dans quelle école vont les enfants maintenant ? Pourquoi avez-vous choisi cette école ?
Ma fille fréquente une école française classique. Mon fils est dans une école américaine très innovante.
Ma fille est née aux États-Unis, pour elle le français est une langue que l'on parle entre nous dans la famille, pas une histoire, une culture, un art de vivre. Nous souhaitions qu'elle baigne dans un environnement français. Qu'elle entende des adultes se vouvoyer, qu'elle apprenne des chansons françaises, qu'elle évolue avec des amis issus aussi de familles françaises.
On sait que l'environnement façonne le cerveau de l'enfant. Il me semblait judicieux de créer l'environnement propice à une véritable exploration de la double nationalité de ma fille afin qu'elle puisse saisir la richesse de la double culture et ne pas devenir 100% américaine, car elle n'est pas américaine, elle est franco-américaine.
Son attachement à des êtres qui lui partagent du savoir et lui apportent de la sécurité affective en dehors de la famille est capital dans sa construction, je suis heureuse qu'elle puisse aussi tisser des liens avec des français. Par la suite, je pense cependant qu'elle rejoindra une école américaine.
Mon fils, lui, a vécu les 4 premières années de sa vie à Paris. Il avait encodé le programme français, le bitume, l'odeur des rues, les interactions sociales à la française, les crêpes au chocolat à la sortie de l'école... Il est très français même s'il s'est beaucoup américanisé par désir d'appartenance notamment. Pour lui, le besoin était donc inverse, comprendre ce nouvel environnement, posséder la langue, l'école américaine s'imposait comme la bonne option.
De surcroit aujourd'hui il a rejoint une école absolument formidable, où il fait aussi bien de la robotique qu'il apprend à bâtir des abris dans la nature. L'équipe pédagogique a pour ambition de maintenir la curiosité des élèves en éveil, de les pousser à l'initiative, la réflexion, d'entrainer leur capacité à résoudre les problèmes, à innover, le tout dans un climat émotionnellement sécurisant.
J'ai aimé cet endroit la première fois que je m'y suis rendue, l'équipe encadrante et la communauté de parents sont tellement accueillantes, concernées et bienveillantes. Je crois qu'en trouvant cette école pour notre fils, nous avons fait basculer son destin et son épanouissement.
Il est de nature très créative, et se trouver dans un système classique était pour lui un véritable supplice qui finissait par le faire douter de ses capacités.
À mon sens, ces choix sont idéaux pour chacun de mes enfants, car ils répondent à leurs besoins du moment tout en étant en adéquation avec ce que nous souhaitons pour leur futur. En tant que parents nous sélectionnons les graines que nous souhaitons voir pousser dans leur verger.
Si vous avez constaté des différences avec le système éducatif français, pourriez-vous nous en parler en détail ?
Évidemment, les différences sont multiples.
Pour moi, en qualité d'adulte, le fait d'avoir mon fils dans une école américaine m'a permis de mieux comprendre la société américaine. Les fondements de l'éducation d'un pays vous éclairent grandement sur l'état d'esprit d'une nation.
Le salut au drapeau chaque matin, la prise de parole en public des enfants dès les plus petites classes, les journées pyjamas, la récompense au mérite, les parades d'Halloween, les foundraising, le volontariat des parents.
Parmi les approches que j'ai trouvées passionnantes dans le système américain, le rapport à l'erreur. Un jour où mon fils travaillait sur un problème de math, il se trompe et rature pour réécrire la bonne réponse à côté. Horrifiée, je lui dis : "Ah non, tu ne fais pas comme ça, tu effaces et tu réécris proprement !" Ce à quoi mon fils m'explique que sa maîtresse lui interdit d'effacer les erreurs.
Je parle de cela dans mon livre "Guide du Cerveau pour parents éclairés" et j'explique comment nos comportements, nos règles, nos remarques, l'usage de certains mots créent un rapport à l'erreur plus ou moins figé dont dépend la capacité de résilience de notre cerveau.
J'apprécie également beaucoup la porosité école/famille qui existe aux États-Unis. Les parents sont plus que bienvenus, ils sont même sollicités. Parfois cela peut faire beaucoup.
Cependant à mon sens, laisser les enfants à la porte de l'école et n'avoir aucune idée de ce qui se passe derrière ces murs est un entrainement à la séparation qui va à l'encontre de la constitution d'êtres unifiés.
Je suis pour la coopération, les interactions, la confiance. Faire grandir un enfant est un travail d'équipe. Dans mon film "Le Cerveau des Enfants", Dan Siegel, un grand spécialiste américain de la parentalité par le prisme du cerveau explique très bien que la clef de l'épanouissement réside dans "l'intégration". Cela veut dire une bonne entente des différentes zones du cerveau, la capacité de les faire fonctionner ensemble, de communiquer - au sens de mettre en commun. C'est donc une réalité biologique.
Parmi les approches que j'ai trouvées passionnantes dans le système américain, le rapport à l'erreur.
Comment votre vie de maman a-t-elle changé ?
L'école aux États-Unis prévoit une bien plus importante implication des parents que l'école en France. Je me suis donc rendue plus disponible, pour le volontariat au jardin, en classe d'art, les célébrations de Thanksgiving, la parade d'Halloween, le café avec le principal, les soirées Mamans.
Par ailleurs, l'école termine beaucoup plus tôt, autour de 14h00. Alors, si vos enfants ne vont pas à l'étude et que vous n'avez pas de babysitter cela implique de boucler votre journée de travail en début d'après-midi quitte à la reprendre plus tard le soir ou à la commencer très tôt. C'est au fond une discipline qui vous impose de hiérarchiser vos priorités et optimiser votre gestion de l'énergie.
Est-ce que les habitudes d'éducation en famille sont différentes de la France ?
L'heure du diner - 18h00, c'est déjà presque tard aux États-Unis et dans de nombreux pays nordiques. Cela dit, la vie commence plus tôt à Los Angeles, se lever avant 6 heures n'est pas exceptionnel.
Par ailleurs, vous êtes invités à diner en famille. Personnellement, je trouve cela très agréable, car être parent n'est pas un obstacle à la vie sociale. A Paris, j'avais une vie plus dissociée, les diners étaient entre adultes. D'ailleurs, certains de mes amis ne connaissent toujours pas mes enfants.
Comment ce changement de vie s'est-il passé pour votre famille et surtout pour vos enfants ?
...Si l'on change sa biographie, on change sa biologie.
Mon fils a tant appris sur lui, sur sa capacité d'adaptation, sur sa richesse intérieure. L'expatriation c'est une vraie aventure et cela pousse à l'introspection à tout âge. Les repères disparaissent, il faut observer, comprendre, s'adapter, se réinventer. Nous ne sommes plus les mêmes personnes. Cette aventure m'a été très bénéfique. Cela m'a permis de sortir de mon programme, de tracer un nouveau chemin, de choisir qui je souhaitais être.
Bruce Lipton, un biologiste qui fait partie de mes mentors dit que si l'on change sa biographie, on change sa biologie. Vivre à Los Angeles a changé ma biographie, et je suis certaine que j'ai aussi changé "cellulairement".
Est-ce que votre vie quotidienne aujourd'hui est différente de celle que vous aviez en France ?
Oui, elle est très différente, mais cela ne tient pas nécessairement au fait de l'expatriation. Je vivais à Paris, je vis désormais au bord de l'océan. Je me lève avec le soleil. J'aurais emménagé à Biarritz ou à Etretat, ma vie aurait changé aussi.
Comment sont les gens à l'égard des étrangers que vous êtes en tant que nouveaux arrivants ?
Los Angeles est une ville de nouveaux arrivants. C'est le Far West, tous ceux qui sont venus ici avaient une quête. On ne s'interroge pas sur là d'où vous venez, mais sur où vous allez.
Si vous pouviez refaire la même expérience, que feriez-vous différemment ?
Rien, tout ce que j'ai fait m'a permis d'être là où je suis aujourd'hui. J'avais besoin de ces expériences bonnes ou mauvaises et je suis très reconnaissante de tout ce qui m'a été apporté sur le chemin.
Comment voyez-vous l'avenir de votre foyer dans ce nouveau pays (tant personnel que professionnel, pour vous et vos enfants) ?
Nous sommes heureux en Californie. C'est pour moi une bulle de créativité. Je pense que ma famille a encore de belles réalisations à faire aux États-Unis. Nous bourgeonnons tous, j'aimerais avoir le temps de la floraison.
Merci à Stéphanie pour ce partage très intéressant et riche. Nous souhaitons une belle floraison à toute sa famille !
Pour suivre l'aventure de Stéphanie aux États-Unis et en France, rendez-vous sur son site.
Son livre "Guide du cerveau pour parents éclairés"
Ce livre couvre une multitude de sujets : des émotions aux croyances, en passant par le fonctionnement de la mémoire, l'hygiène de la pensée et l'importance de l'engagement physique et social. Il permet de comprendre comment tout est imbriqué, et ouvre des pistes de réflexion originales pour découvrir le fonctionnement du cerveau pour mieux accompagner nos enfants et les aider à révéler leur plein potentiel.
Cet ouvrage est très riche en informations. Il offre des exemples concrets, des exercices pratiques et faciles à expérimenter dans la vie de tous les jours pour tous les parents.
Son film "Le Cerveau des Enfants"
Le film "Le Cerveau des Enfants - un potentiel infini" est une immersion passionnante dans les neurosciences. Les auteurs expliquent comment nos expériences dans l'enfance sculptent notre cerveau et le préparent à notre future vie d'adulte. Le film donne les clefs aux éducateurs et aux parents pour prendre soin du cerveau de nos enfants et pour le développer correctement. Comment aider nos enfants à mieux gérer leurs émotions, à ne pas avoir peur des erreurs, à rebondir après un échec, à apprendre mieux ? Le film donne des pistes pour répondre à ces questions.
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